La presse en parle...



La funeste nuit d'un loup en peluche qui ne devait plus murmurer à l'oreille des enfants
Une histoire de Ludovic Huart illustrée par Franck Dion

La presse en parle...


L'avis de Ricochet

Le livre a été sélectionné SÉLECTION RICOCHET 2011

Gribouille, « garçon-chiffon », rêve beaucoup mais fait aussi quelques cauchemars, parfois. Lorsque Le Grand Chambardement commence, il n'est plus question de rêver : les enfants rêveurs n'ont plus le droit d'aller à l'école, de jouer, d'aller au cinéma ou au théâtre, de recevoir des cadeaux, de vivre. Les peluches sont détruites, les familles inspectées et les rêveurs dénoncés. Gribouille, ne sachant plus comment agir, se cache. Cet album, au texte très développé, propose une métaphore originale de la Seconde Guerre mondiale. L'histoire, triste et tragique, montre que la vie réelle l'est aussi et le récit, instructif et poétique, regroupe alors les qualités nécessaires pour captiver l'attention et inciter à réfléchir. Quant aux illustrations, sombres et effrayantes, elles ne représentent pas exactement les scènes narrées : elles apportent un complément en offrant un autre regard sur l'histoire. Les nombreuses références et allusions semées au court du récit donnent aussi envie de relire de grandes œuvres comme Pinocchio ou Max et les maximonstres. Cet album, destiné aux enfants à partir de 12 ans, incite donc grandement à réfléchir et à débattre, tout en proposant de nombreuses pensées poétiques.
Déborah Mirabel
Lire la chronique : Ici

L'avis de Sceneario.com

Gribouille est un petit garçon presque comme les autres, et sa peluche préférée est un loup. Un petit garçon "presque comme les autres" car à y regarder de plus près, on remarque quand même, détail important, qu’il est en réalité fait... de chiffons cousus et de paille ! Quoi qu’il en soit, Gribouille vit dans un triste quartier appelé Skeleton, dans un univers pas franchement merveilleux. Sa maison est toute petite, désaffectée et coincée entre d’autres... Mais surtout, surtout : le monde dans lequel il vit subit le "Grand chambardement" et voit le terrible Mange-Feu s’autoproclamer Roi de l’épouvante en faisant payer aux enfants les torts dont il les accuse, les privant entre autres de la liberté de rêver...! 
Par Sbuoro

(06 Décembre 2010)
La maison d’édition "L’album des vilains gamins" a été créée en 2009 avec comme ambition de voir portés à la scène les récits qu’elle publie. Démarche peu étonnante puisque l’on sait que Ludovic Huart verse dans le théâtre depuis longtemps et a déjà fait jouer d’autres de ses œuvres sur les planches, et notamment La monstrueuse histoire d’un petit garçon moche et d’une petite fille vraiment très laide, album paru aux éditions Des ronds dans l’O en 2010. Une fois encore, avec ce nouvel ouvrage au titre acrobatique, Ludovic Huart met au centre de son récit l’étrange, le dérangeant, mais aussi le rêve et quelque chose d’antinomique : l’angoissant. Les cauchemars ? Avançant à pas feutrés dans l’ombre de leurs rêves ? Tout est en effet sombre et apeurant : des trombines des personnages aux décors toujours assez effrayants ! Dans ce conte plane d’ailleurs à un moment le spectre de la comparaison avec les rafles effectuées par les Nazis... Ludovic Huart aime jouer avec tout cela : les rats, les araignées et les méchants loups de contes, les cicatrices sur les peaux, les maisons hantées et des mondes insoupçonnables où les enfants seraient emmenés... Des êtres maléfiques et des êtres aimés à qui il arrive malheur, également. Et la mort, aussi, bien entendu... Brrrr !
Les superbes illustrations qui accompagnent ces sombres aventures sont signées Franck Dion. On aurait presque aimé qu’il traite tout le récit en bandes dessinées ! De belles mises en place, de belles luminosités... Des visages effrayants, aussi ! C’est vraiment très beau, bravo !
La funeste nuit d’un loup en peluche qui ne devait plus murmurer à l’oreille des enfants est donc une autre lecture "train fantôme" orchestrée par Ludovic Huart dans laquelle on est crispé et frissonnant tout du long mais de laquelle on ressort ravi de l’expérience... Bouh !!!!
L'avis de LA RUBRIQUE A BRAC
Nom de Zeus, les amis !
Moi qui avais pourtant juré devant Copernic que jamais plus je n’utiliserai cette machine infernale, voici que j’ai de nouveau craqué et suis remonté à bord de la DeLorean volante pour un voyage dans le temps. Mais que voulez-vous, on ne se refait pas, et vous savez qu’entre deux expériences de la plus haute importance, j’apprécie grandement de me décontracter en lisant une bonne bande dessinée. Or, lors d’une recherche sur internet, je suis toimbé sur quelques images issues d’un livre au nom bien étrange : La Funeste Nuit d’un Loup en Peluche Qui Ne Devait Plus Murmurer à l’Oreille des Enfants. Curieux comme un bon scientifique que je suis, je n’ai pu résister à un petit bond en avant afin de jeter un œil à cet intrigant ouvrage qui devrait assurément se trouver dans ma bibliothèque du future !


Et en effet, il y était… ou il y sera, comme vous voudrez !


Par crainte de risquer de briser le continuum espace-temps, je n’ai pas osé demander à mon moi du futur qu’elles furent / seront mes impressions à la lecture, et ne pourrait donc pas vous en faire ici un rapport détaillé ; mais l’homme faible que je suis n’a pu clore ses yeux lorsque ceux-ci tombèrent sur le résumé en quatrième de couverture ou sur les quelques dessins entre-aperçus en reposant ce bel objet sur son étagère…
…et heureusement pour vous, je portais à ce moment là mes révolutionnaires lunettes-scanner à impression rétinienne !


Je vous laisse donc vous faire vous même une idée sur cette étrange histoire pour vilains gamins en quête de frissons et pour tous les sales gosses qui sommeillent en chacun de nous :
«…Gribouille est un petit garçon-chiffon qui vit dans un monde, pas franchement merveilleux. Depuis qu’il n’y a plus rien à manger, il y a des bruits qui courent, des rumeurs bizarres qu’on raconte. Les voisins qui bavardent beaucoup disent qu’un terrible monstre – plus connu sous le nom de Mange-feu – a commencé à grignoter la Terre toute entière. […] Mange-Feu, prétextant que les enfants sont la cause de bien des chagrins, décide donc de régner en Roi de épouvante et transforme le monde en une cité cauchemardesque dans laquelle il est interdit aux enfants de rêver… »
 

Alors si vous aussi, l’impatience vous taraude de découvrir cet alléchant livre, sachez que grâce à ce lien, vous pouvez vous aussi agir sur le continuum espace-temps en commandant dès aujourd’hui ce livre et en vous le faisant livrer au pied de votre sapin avant même qu’il ne paraisse dans le futur :
Livraison dans le présent de l’album à venir
Mais qu’entends-je ? L’horloge de l’Hôtel de Ville retentit déjà ?!
Nom de Zeus, il faut que j’aille porter secours à ce pauvre Marty !

par PaKa.



L'avis de ACTUALITÉ LITTÉRAIRE.COM


Après « La monstrueuse histoire d'un petit garçon moche et d'une petite fille vraiment très laide » Ludovic Huart publie son nouveau conte : « La funeste nuit d'un loup en peluche qui ne devait plus murmurer à l’oreille des enfants » pour le début de cette année 2011.
Gribouille, un garçon-chiffon vit dans un monde affreux. Il vit dans un grenier, n’a plus rien à manger et le monstre Mange-feu interdit à tous les enfants de rêver !
Dans son style rêveur, noir mais beau à la fois, Ludovic Huart réussit parfaitement son œuvre en ajoutant à son histoire une double lecture parée de références. Les illustrations signées par Franck Dion servent parfaitement ce conte, en y ajoutant de la noirceur et de la sobriété.
Benjamin


Lire la chronique et l'interview de Ludovic Huart : Ici.

Avant d'être auteur, vous êtes surtout un homme de théâtre, comment ces deux univers s'enjambent ?
En fait, je viens du théâtre, de la scène, mais j'ai toujours été sensible à l'écriture. D'ailleurs, avant d'entamer des études théâtrales, j'écrivais de très courtes nouvelles. Très jeune, j'avais envie de faire du cinéma, réaliser des films. J'écrivais donc des histoires fantastiques et c'est en voyant l'étrange noël de Mister Jack que j'ai compris que je voulais faire du théâtre. C'est étonnant sans doute comme réponse, car il s'agit là d'un film et non d'une pièce de théâtre, mais pour moi le travail consistait avant tout à mettre en scène des marionnettes. Que ce soit une pièce de théâtre ou un livre de littérature jeunesse, tout repose – à mon sens – sur la mise en scène. Mettre en scène un texte (l'écrire), c'est avoir une vision dans l'espace de ses personnages, des lieux qu'il fréquente, des choses qu'il déteste... la scène est donc la concrétisation physique de cet imaginaire. J'écrivais « autrefois » des pièces de théâtre (J'ai trouvé une pelle pour enterrer ma poupée, éditions ALNA –2009) et mon écriture pouvait paraître trop narrative, trop descriptive. Mes personnages étaient avant tout les témoins d'une situation et non pas les acteurs de telle ou telle action. J'ai donc décidé finalement de réorienter mon travail, de me positionner ailleurs, non pas parce que j'avais envie de faire autre chose, non, mais tout simplement parce que mon écriture était plus adaptée à un autre genre, celui de la littérature. Aujourd'hui, lorsque j'écris une histoire, j'ai toujours en tête la scène, et donc, l'intérêt d'écrire mes propres histoires, c'est de pouvoir ensuite les porter à la scène. C'est ce que je fais avec la compagnie du Théâtre des Mots Dits que je dirige depuis 2003.

Votre première œuvre « la monstrueuse... » a été publiée aux éditions Des ronds dans l'O. Pourriez- vous nous parler de cette maison d'édition ? Comment s'est faite la rencontre ?
En 2009, j'ai écrit La monstrueuse histoire... qui était en réalité mon premier album jeunesse que je caractériserai plus comme étant un conte noir pour tout public, avec cette spécificité de s'adresser aussi aux jeunes lecteurs (à partir de 8 ans). J'ai ensuite adapté à la scène cette histoire mêlant marionnettes et théâtre et parallèlement j'ai proposé à diverses maisons d'édition ce projet. Certaines étaient emballées mais avaient des difficultés à positionner le livre. La question qui revenait souvent était : est-ce vraiment une histoire pour enfants ? Et à cette question, je ne répondais jamais. Pour moi, il est évident que ce livre s'adresse avant tout aux enfants mais comme je l'expliquais plus haut, j'aime écrire des histoires avec une double lecture. Je ne cherche pas à exclure l'adulte qui lira cette histoire à son enfant. Je ne cherche pas non plus systématiquement à m'adresser à l'adulte, j'ai fait le choix d'écrire des histoires, après, le lecteur me choisira ou pas. Lorsque j'ai proposé ce projet à Marie Moinard, directrice des éditions Des ronds dans l'O, je ne connaissais presque rien de ce qu'elle publiait mais j'avais pu constater que ses choix éditoriaux étaient engagés. Les sujets qu'elle défendait correspondaient à l'idée que je me faisais d'une jeune maison d'édition. Prendre des risques, et savoir les assumer tout en s'imposant face aux autres maisons d'éditions. D'autre part, pour ma part, en tant que jeune auteur, je trouvais ça intéressant de démarrer une nouvelle aventure chez Des ronds dans l'O car en dehors de publier des textes, je savais que Marie Moinard allait aussi et surtout défendre les titres qu'elle éditait. Et ça marche !

Comment vous est venue l'idée de cette œuvre monstrueuse ?
Enfant, j'avais très peur du noir. Comme beaucoup, je pensais que de nombreux monstres se terraient sous mon lit, dans mon placard, pire encore, au fond des draps... pour cette histoire, je voulais renouer avec mes propres peurs, mes propres souffrances afin peut-être de mieux les appréhender. Il est question il est vrai de monstruosité dans ce livre, de la différence, de la peur de l'enfance, mais cette histoire parle avant tout de solitude. Cette œuvre n'est pas autobiographique, heureusement (rires). C'est une vision quelque peu déformée de mon enfance, de mes rêves et de mes cauchemars. D'ailleurs, petite histoire en tout intimité : quand j'étais enfant, je jouais avec des barbies. N'ayez crainte, ce temps est loin derrière moi, et d'ailleurs pour être vraiment sincère, je les découpais avant de les faire cuire. (rires). Voilà, cette histoire était la première, et peut-être même la plus proche de moi ; mes angoisses, mais aussi mes rêves.

Comment définiriez-vous votre univers ?
Étrange. Non pas parce qu'il aborde des thèmes obscurs, mais plutôt parce que mes histoires côtoient de façon permanente une certaine étrangeté qui, je le souhaite, invite à un voyage aux frontières du fantastique, du merveilleux et du réalisme pour atteindre l'onirique, le sordide. J'aime écrire des histoires jusqu'aux limites de l'irréel, de l'impossible ou de l'inexplicable.

Justement, quelles sont vos influences pour créer cet univers ?
Comme je l'expliquais un peu plus haut, enfant, j'ai été fasciné par l'univers de Tim Burton. Il y avait une part de macabre que j'adore chez lui. Je me suis senti proche de cet univers, autant que celui des films comme Elephant Man, Freaks... avec un goût prononcé pour le baroque. En littérature, je suis admiratif du travail d'Edgar Allan Poe.

Votre prochain livre « la funeste nuit d'un loup en peluche qui ne devait plus murmurer à l'oreille des enfants » sort bientôt, pouvez-vous nous en parler ?
Il s'agit là, bien évidemment, d'un nouveau conte noir, très noir. C'est un rêve, mais aussi un cauchemar – un monde obscur, souterrain auquel on accède par la porte du placard à balais – et comme dans tous les contes, il faut accepter de ne pas tout comprendre, de ne pas tout maîtriser, juste ressentir et vivre. C'est aussi l'histoire extraordinaire d'un petit garçon, dénommé Gribouille qui à cause du Grand Chambardement va se retrouver seul. Ses parents se font arrêter, et il est caché dans un placard à balais. Mais le titre s'intéresse surtout à ce loup en peluche. Dans cette nouvelle aventure, les animaux en peluche sont donc les héros ; d'ailleurs, un certain Mange-feu (dictateur fou furieux) a compris que seuls les enfants avaient la possibilité de changer le monde, grâce aux rêves et à une certaine innocence. Il va donc mettre en place des lois interdisant aux enfants d'être des enfants. Une phrase que j'aime beaucoup dans cette histoire est la suivante « Interdit aux clébards et aux enfants rêveurs ». Il s'agit de l'école et plus généralement de tous les autres lieux publics. Vous l'aurez compris, c'est une réécriture de la seconde guerre mondiale. Je voulais raconter cette période de l'histoire vue par un enfant. Comment un enfant de 7 ans vit-il la guerre ? Que voit-il vraiment ? L'enfant apparaît ici comme une perception troublée de la réalité. Il sent et perçoit intuitivement le non-sens : la non évidence des événements tragiques, la fragilité des choses et du monde, l'incompréhension d'un quotidien démesuré, déformé. Comme un être non corrompu par un monde hostile et violent, l'enfant est peut-être, dans notre imaginaire, un représentant d'une innocence perdue. D'ailleurs, je devrais prochainement recevoir le soutien de la Fondation de la Mémoire de la Shoah qui se dit pour le moment « favorablement impressionnée ». Je voulais aussi préciser que pour ce projet, je suis soutenu par la Communauté des communes de la Vallée de l'Hérault. Je bénéficie à ce titre depuis le 15 octobre dernier (jusqu'au 15 janvier prochain) d'une résidence d'auteur à Montpeyroux et ai reçu une bourse de création littéraire www.lafunestenuit.com .

Les illustrations seront réalisées par Franck Dion, c'est donc un nouvel univers graphique ?
Effectivement, pour ce projet, j'ai souhaité m'entourer d'une nouvelle équipe, apporter un regard neuf sur mon écriture. La monstrueuse histoire a été et reste une magnifique aventure, mais ce nouveau livre, c'est vraiment un rêve de gosse. J'ai la chance de pouvoir écrire cette histoire mais aussi de pouvoir l'éditer grâce à la collection des vilains gamins que je dirige au sein de ma compagnie de théâtre. C'est fascinant le monde de l'édition. C'est cruel aussi. C'est pourquoi, cette fois, j'ai souhaité faire "made in maison". Franck Dion a cette singularité d'être un véritable créateur. Il écrit, réalise et produit ses courts métrages via sa boîte de production (Papy3D); C'est un homme issu du monde du théâtre qui s'est formé tout seul. C'est un peu un artisan de l'art. Voilà pourquoi j'ai souhaité lui proposer ce projet. Je savais que ce livre serait d'un point de vue esthétique, parfait. Franck Dion est un artiste au combien talentueux et sensible. Ses courts métrages regorgent de préoccupations qui sont aussi les miennes. C'est véritablement une belle rencontre et je suis fier de partager cette aventure avec lui.

Sur votre site se trouve une collection d'illustrations « Sparadrap » signées de votre main. N'êtes-vous pas tenté de réaliser vous-même les illustrations de vos livres ?
Il y a encore quelques mois, j'aurai sans hésiter répondu oui. Mais j'ai bien compris qu'il était difficile de jongler entre l'écriture et l'illustration pour un même projet. Ce qui m'intéresse vraiment ici, c'est de pouvoir confier en toute liberté à un illustrateur la possibilité d'apporter son « grain de sel ». Franck Dion a un univers graphique qui colle tout à fait à mon écriture et en même temps, il apporte quelque chose de nouveau, autre chose. Son travail est subtil, fin et délicat. Il donne de l'importance et de la beauté à des personnages intimes qui n'en ont socialement pas. Peut-être un jour je franchirai le pas, pour le moment, je réserve cela à des illustrateurs de grands talents.

Des projets en cours ?
Cette histoire est déjà en cours d'adaptation et sera présentée au théâtre le 14 avril 2011 au Théâtre de Charleville-Mézières puis présentée dans le cadre du Festival Mondial des Théâtres de Marionnettes (septembre 2001) à Charleville-Mézières. Enfin, je démarre deux nouvelles histoires qui devraient voir le jour en 2011 et 2012. Il s'agit de "L'épouvantable noël du vieux monsieur barbu tout de rouge vêtu"... dont un album devrait être publié chez Des vilains gamins ... en fin d'année 2011, à suivre !

Un dernier mot ?
En espérant qu'il y aura encore de belles et monstrueuses histoires à raconter, et de nombreux et affreux lecteurs pour les écouter.

Merci à Ludovic Huart !
Interview réalisée par Benjamin.


 


L'avis de Julie Cadilhac, journaliste chez BSC NEWS

Le livre a été sélectionné dans la catégorie "LES INCONTOURNABLES"


Après sa monstrueuse histoire d'un petit garçon moche et d'une petit fille vraiment très laide, Ludovic Huart nous invite dans un cauchemar encore plus effrayant. Une époque où l'on fait  naître des enfants-bourriquots  qui travaillent en pyjamas rayés au fond des mines, une époque où l'on est condamné à se nourrir de charbon-chocolat . Un  lieu aussi noir que la suie au nom repoussant  de" Skeleton", un  quartier aussi malheureux que les pierres, aussi affamé que désespéré dans lequel surgit un dictateur effrayant: un "mange-feu" qui prône la déportation des peluches des enfants rêveurs et qui interdit toute liberté et tout loisir. De quoi vous glacer le dos!
Sous prétexte que "rêver ne rend pas libre", dans ce pays-là, le roi de l'épouvante s'acharne sur les enfants qu'ils jugent responsables des malheurs que le pays supporte. Gribouille, petit garçon peu traditionnel, un "enfant-chiffon" dont le " corps [est] en toile piquée - rempli de paille de la tête aux pieds" et qui porte " du matin au soir[...] un pyjama rayé à poils ras, raccommodé par endroits avec des morceaux de fourrure usée- sur lequel il avait cousu une longue corde-queue de rat" ,devant tant de maux, préfère s'enfermer dans un placard aux balais et rêver d'un monde plus clément. Et puis, un jour, au milieu d'une foule effrayée qui piétine sur le pavé,  il  rencontre Loup qui s'est caché dans une valise lors du grand chambardement....Loup qui écrit des lettres à  Gribouille lorsque ce dernier disparaît dans son ventre. Loup  qui rêve qu'il suce ses doigts maculés de chocolat pour tromper la faim et qui, surtout, surtout, ne doit pas sortir de sa cachette de peur de mourir d'effroi.

La funeste nuit des enfants est une métaphore troublante de la Shoah. La suppression froide et calculée des peluches du pays du Mange-Feu est une monstruosité que perçoivent tous les enfants de cette terre et qui provoque des réminiscences historiques fort désagréables auprès des adultes. Dans ce récit -cauchemar, les mots de Ludovic Huart, à la fois accessibles et extrêmement poétiques par leur formulation enfantine et le choix de métaphores parlantes, sont justes. Son phrasé, porté par une oralité qu'il hérite de son expérience de metteur en scène, ajoute à l'efficacité du texte et facilite la mémorisation de certains détails essentiels ( " de la tête aux pieds") .
Les dessins sombres de Frank Dion créent un univers oppressant où la lumière est bannie. Dans une narration où l'espoir ne tient qu'à un maigre fil qui s'effiloche dangereusement, l'illustrateur brosse un monde gris où la vie se meurt. et où les chimères "s'en donnent à cœur terreur".  Seule la dernière planche, porte sur l'avenir, irradie d'espoir.
Un livre qui ne peut pas laisser indifférent et qui, en choisissant d'évoquer le pire cauchemar d'un enfant, rappelle avec plus de vivacité encore aux adultes toute l'horreur de la déportation. Un livre intelligent.

" A l'intérieur, serrés comme ils étaient, les animaux en peluche pouvaient à peine respirer, mais aucun d'entre eux ne se plaignait. ils se consolaient en pensant que bientôt  ils pourraient enfin s'amuser comme avant, mais le voyage étaie interminable. Après de longues heures de route à travers les campagnes, le train fantôme s'enfonçait lentement dans la forêt et continuait inlassablement son chemin, roulant toute la nuit, pendant longtemps, et plusieurs nuits. Au bout de quelques jours enfin, les wagons s'arrêtaient dans un bruit de ferraille tout en s'entrechoquant à l'entrée du camp maudit. Brusquement, les portes s'entrouvraient et dans un désordre confus, tous les animaux en peluche se regroupaient dans la cour de récréation. Privés de tous leurs bagages [...] et prétextant une invasion de puces et de poux, ils étaient rasés - de la tête aux pieds- et avec les poils et la fourrure, on s'en servait pour tricoter des chaussettes et des couvertures [... ]." ( Ludovic Huart)
Julie Cadilhac
Lire la chronique : Ici

" La funeste nuit..." dans le magazine ELEGY N°67 - Février/mars 2011